169 « enfants du djihad » ont été rapatriés en France

169 « enfants du djihad » ont été rapatriés en France

169 « enfants du djihad » ont été rapatriés en France

Des députés et des sénateurs LR ont adressé un courrier au chef de l’État pour réclamer une évaluation de leur suivi.

Mardi, quelques « enfants du djihad » sont arrivés à Paris depuis la Turquie. Rappel discret d’un problème des plus sensibles dans sa dimension humanitaire, politique et sécuritaire. Le 28 juin, à l’initiative de Bérangère Poletti, députée LR des Ardennes et membre de la commission des affaires étrangères, un groupe de députés et de sénateurs Les Républicains ont adressé un courrier au chef de l’État concernant l’accueil de ces enfants. Selon un dernier bilan, au 6 juillet, 169 seraient rentrés en France. Dont 35 ont été rapatriés depuis les camps syriens contrôlés par les Kurdes, le reste ayant transité par la Turquie. Quelque 300 enfants français sont toujours dans les camps syriens. Face aux initiatives (tribunes, saisine des instances internationales...) demandant leur rapatriement, qui trouvent des échos dans plusieurs formations politiques et jusqu’au sein de la majorité présidentielle, les élus LR s’interrogent, eux, sur le suivi (social, psychologique...) mis en place en 2017-2018 pour les enfants déjà revenus.

Dans sa lettre, cosignée par 22 députés et sénateurs, Bérangère Poletti affirme ainsi que l’efficacité de ce suivi « n’a fait l’objet d’aucun bilan ou d’évaluation » . Une lacune particulièrement préoccupante pour deux raisons. La première tient au vécu de ces enfants avec des « dégâts psychologiques sans appel après avoir évolué dans un contexte de violence de guerre inouï » . Sans oublier pour certains un « état psychologique » encore aggravé « par la séparation récente avec la figure d’attachement, leur mère, incarcérée dès leur arrivée sur le sol français » . Et pour les orphelins, le problème de « la perte de filiation qui laisse des traces indélébiles » . Placés par les services de l’aide sociale à l’enfance, ces enfants traumatisés sont par ailleurs « confrontés à la difficulté d’adaptation dans leurs familles d’accueil, qui ne sont pas toutes formées et préparées à accueillir des enfants avec un tel vécu » . Or, et c’est la seconde raison d’inquiétude des élus LR, « l’accompagnement institutionnel en France des enfants en difficulté sociale est souvent décrit comme défaillant » . Un constat inquiétant aux yeux des élus alors que, dans ce cas très particulier, on ne « devrait en aucun cas tolérer la moindre faille » sous peine de « suites délétères pour les enfants et pour ceux qui les entourent » . Et de souligner que « ces enfants doivent pouvoir retrouver un développement normal, à l’unique condition que la prise en charge soit à la hauteur de la problématique » .

Des retours au cas par cas

Les élus LR demandent donc au chef de l’État « qu’une évaluation soit diligentée dans les plus brefs délais par le gouvernement sur les conditions d’accueil (...) , et ce, avant toute nouvelle admission et afin d’adapter notre qualité d’accueil » . En l’absence d’une réponse officielle, un projet de commission d’enquête serait envisagé. Signataire de la lettre, la députée du Maine-et-Loire, Anne-Laure Blin, souligne que cette évaluation est cruciale car « il ne faut pas s’aventurer à l’aveugle sur un tel sujet mais faire preuve de bon sens et de pragmatisme. C’est notre rôle de contrôler l’action de l’exécutif » .

Du côté des autorités, on affiche la plus grande sérénité face à cette démarche, un expert soulignant que le suivi des enfants en question « est très fin » , notamment sous le contrôle des parquets. Quant à la doctrine française sur les camps syriens, elle n’a pas changé : pas de rapatriement des adultes et retour des enfants au cas par cas.

Concernant les mineurs revenus en France, un projet de fichier spécifique, destiné à assurer un meilleur suivi, serait à l’étude. Par le passé, quelques signes inquiétants ont été relevés, comme cette infirmière indiquant qu’un rapatrié de 12 ans avait fait un geste d’égorgement. Mais une source policière souligne, pour l’heure, l’absence « d’alerte sérieuse » . Évaluation ou pas, tout dépendra sans doute de l’évolution de la situation sur le terrain syrien. « La situation dans les camps reste très difficile , note un spécialiste. Daech est présent dans les camps et l’État islamique assure vouloir récupérer les « lionceaux du califat » . » Quant au front, un temps uni, des pays occidentaux, il continue à se fissurer avec les décisions des autorités belges, allemandes, danoises, finlandaises de rapatrier l’ensemble de leurs ressortissants.

Le Figaro - 8 juillet 2021

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